Lectio divina
Une lectio divina est une commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposées par l’Église pour la Messe du jour.
Lectio divina pour la nuit de Noël
A NOËL, LE CŒUR DE L’HOMME DEVIENT LA CRÈCHE OÙ DIEU DEMEURE
Puisque les chrétiens sont encore intéressés par la Messe de la nuit de Noël, profitons-en pour approfondir ce mystère de l’Incarnation que nous fait revivre la Liturgie. Car Dieu nous enseigne beaucoup de choses en cette sainte Nuit, et nous devons être attentifs à son enseignement afin d’en goûter les fruits de grâces qu’Il promet à ceux qui se rassemblent en Son Nom pour Le prier…
Dieu est toute ma vie
La première chose que Dieu me dit : c’est qu’Il est toute ma vie. Oui, Dieu est toute notre vie ! Qu’est-ce en effet que le mystère de l’Incarnation si ce n’est cette prise par Dieu de la chair de l’homme, de son corps, de tout son être ? Si Dieu a pu ainsi s’emparer de ce que nous sommes, de notre humanité, c’est parce qu’il y avait entre la nature de Dieu et la nature humaine une certaine ressemblance, une connaturalité. En cette nuit de Noël, lorsque nous voyons la naissance de Jésus, la naissance de Dieu en l’homme, il nous est révélé que Dieu est déjà présent en chacun et chacune d’entre nous. Parce que si Dieu a pu venir, a pu prendre notre humanité, c’est qu’il y avait un peu de Lui-même en cette humanité… Que même dans nos cœurs les plus noirs, dans nos moments les plus lâches par rapport à ce Dieu, il y a encore en nous une image, une image divine.
Cette image, cette présence de Dieu, c’est la présence de mon Créateur. Il est présent au plus profond de moi. Il m’est plus intime que je ne le suis à moi-même disait Augustin. Il est l’âme de mon âme, Il est la Vie de ma vie parce qu’Il m’a créé. Et parce qu’Il m’a créé, je Lui ressemble. Et parce que je Lui ressemble, Il peut s’incarner dans cette humanité.
Dieu est toute ma vie. Chacun peut le dire parce que Dieu est au fond la Source, le jaillissement de notre vie.
Dieu est pour l’homme !
Cette présence de Dieu, que l’Incarnation me révèle, elle me fait quelquefois peur… J’ai l’impression de ne plus m’appartenir. J’ai un peu le réflexe de la révolte, ou du moins de l’indépendance. Alors, ce soir Dieu me rassure en m’enseignant que, s’Il est toute ma vie (parce qu’Il est en moi comme Créateur, l’âme de mon âme) Il ne prend cependant pas de place dans ma vie ! Il est discret, infiniment petit, invisible. Il ne gêne personne, délaissant l’auberge inhospitalière, Il se contente de la crèche voisine…
Il y a plus encore : non seulement Dieu, qui est toute ma vie, ne prend pas de place dans ma vie, mais, surtout, Il ne prend pas la place de ma vie, celle que je chéris – à juste titre ! -, celle que je défends – et c’est normal ! Cette liberté qui me fait être moi-même, pour laquelle je lutte, dans laquelle je m’épanouis, Dieu me la laisse. Comment pouvons-nous avoir peur que Dieu prenne notre vie puisqu’Il vient en la nôtre ? Peur qu’Il brise la vie, Lui qui naît à la Vie ? Peur qu’Il nous enlève à nous-même puisqu’Il vient à nous ? Arrêtons de penser que Dieu est contre l’homme et regardons cette nuit, au contraire, que Dieu est pour l’homme, que le plus grand souci de Dieu c’est la liberté de l’homme ! Paul le dira : « Le Christ nous a libérés pour que nous soyons vraiment libres » !
Je suis deux : moi et Lui, Lui en moi !
Dieu est présent ; Il est toute présence en moi, et pourtant Il ne prend pas de place, et surtout Il me laisse toute ma place. Alors, en considérant cela, je sais que dans ma vie je ne suis jamais seul. Je sais que quelle que soit ma solitude humaine, souvent douloureuse, Il est là. Je suis deux : moi et Lui, Lui en moi ! Et, quelles que soient mes souffrances, quelles que soient mes épreuves, ces épreuves particulièrement pénibles que sont les amours et les amitiés déçus, dans une famille, dans un groupe social car ce qui blesse le plus le cœur de l’homme, c’est cette déception de l’amitié, quelles que soient ces croix de ma vie, quelles que soient ces désillusions, je sais qu’Il est en moi l’Ami unique, comme le révèlera Jésus à Pascal.
Car Dieu, s’Il est présent, Il est présent d’une présence d’amitié. Rien ne contraint Dieu fors l’amour ! S’Il vient en notre humanité, c’est parce qu’Il s’y plaît. Il s’y plaît parce qu’Il aime l’homme. Et Il aime l’homme parce qu’il est Son fils, Son enfant qu’Il a créé comme tel, à Son image ! C’est par Son amour que j’existe et c’est par ce même Amour qu’Il est présent en moi ! Son amitié me fait vivre et c’est cette amitié vivifiante qu’Il est venu révéler par Son Incarnation…
« Toi, au moins, aime-moi ! »
Alors, si j’accepte cette pauvreté, mais est-ce vraiment une pauvreté de comprendre que je n’existe que comme fruit de l’Amour de Dieu ?, si j’accepte cette dépendance d’être parce que je suis Son enfant, l’ami de Son Cœur, si j’accepte de vivre dans cette dépendance amoureuse comme le fit Marie, si j’accepte ce soir l’Incarnation qui me dévoile cette dépendance, alors je peux recevoir un cadeau magnifique. Ce cadeau n’est pas l’Amour de Dieu. Cet Amour m’est acquis car Dieu ne se reprend jamais : Il m’aime quelle que soit ma lâcheté, quelles que soient mes trahisons, quels que soient mes oublis. Non, si j’accepte cette amitié qui me fait vivre, je vais recevoir le fabuleux cadeau de devenir ami de Dieu !
Parce qu’en cette nuit l’Incarnation ne révèle pas seulement la présence de Dieu en l’homme. Elle révèle la présence de l’homme en Dieu et de l’homme ami de Dieu. Elle la révèle comme possible.
Jésus. Vrai Dieu et vrai homme. Jésus vrai Dieu me révèle la présence amicale de Dieu en moi. Jésus vrai homme me révèle l’amitié que l’homme peut rendre à Dieu ! L’amitié de Jésus, l’homme parfait, l’Homme, pour son Dieu…
Et comme Jésus est Dieu, cette amitié qu’Il a vécue en tant qu’homme devant nous pour Dieu, Il peut encore la vivre à travers nous, en nous, si nous acceptons qu’Il y soit, c’est à dire qu’Il y naisse par Sa gâce. C’est la grâce que nous devons demander durant la liturgie de Noël : que Jésus naisse en nous par Sa grâce, que l’Homme qui est né à l’amitié de Dieu, naisse en notre âme ! Afin que, durant toute cette année, chacun puisse aussi, en Lui et par Lui, devenir ami de Dieu.