Lectio divina
Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.
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« RECEVEZ L’ESPRIT SAINT ! »
Lectio divina pour la solennité de Pentecôte
Ac.2, 1-11 1Cor.12, 3-13 Jn.20, 19-23
Voilà enfin le jour où l’Église célèbre sa propre naissance. Nous avions évoqué, dimanche dernier, le ‘Noël de l’Église’. C’est le jour où nous célébrons nous-mêmes notre naissance, non pas en tant qu’individu racheté, puisque cette naissance à la Vie divine s’opère le jour de Pâques, mais nous célébrons notre naissance en tant que corps, peuple choisi, constitué, animé par la Vie divine. Animé par la fine pointe de la Vie divine qui est l’Amour.
Et comme nous le remarquions encore dans notre commentaire de dimanche dernier, pour vivre cette naissance en tant que peuple, en tant qu‘ecclésia, pour vivre cette ‘animation’ (au sens premier de la vie de l’âme) par l’Esprit de Dieu, ce Souffle de Vie reçu, les apôtres sont réunis ensemble, comme nous tous pouvons l’être à nouveau aujourd’hui pour recevoir l’Agape, la Charité qui va transformer notre amitié humaine en amitié divine.
« Dieu est Amour »
Oui aujourd’hui il faut se rendre compte du don que nous recevons de la part de Dieu ! Dans les jours saints du vendredi, de la Vigile pascale, Dieu nous donne Son Fils. Mais aujourd’hui Dieu nous donne Sa Puissance, Dieu nous donne ce qui Le fait respirer, Dieu nous donne ce qui Le fait être ce qu’Il est, ainsi que le définit Saint Jean : « Dieu est amour. »
Et ce Principe même de Sa Vie, Son Cœur, Il nous Le donne : Dieu nous donne Son Amour !
Dieu ne nous dit pas seulement qu’Il nous aime, mais Dieu nous donne ce qui Le fait être Lui-même. Dieu nous donne cette Personne, cet Être parfait, surabondant, qui est l’Esprit-Saint.
Pour nous qui avons des relations humaines et des amours humaines si imparfaites, nous savons comme c’est difficile d’aimer ! Pourtant nous sommes poussés à l’amour… Nous savons bien que dans l’amour réside le but de notre vie, notre accomplissement et notre joie !
Lorsque nous voyons des personnes désespérées, tristes, nous comprenons que c’est parce qu’elles n’ont plus d’amour, parce qu’elles n’ont plus rien à donner et plus rien à recevoir, elles sont seules. Même au milieu de l’opulence, de la richesse, des relations et des mondanités, il y a des êtres qui sont seuls. Ne parlons pas des pauvres, ne parlons pas de ceux qui sont prisonniers, ne parlons pas des orphelins qui, ceux-là, sont plus que seuls ! Ils ne reçoivent plus d’amour, ils n’ont plus d’amour à donner et leur vie devient sombre, noire.
« Dieu nous a tant aimés… »
Nous le sentons bien dans nos familles, dans nos communautés, dans nos paroisses, ce qui fait vivre, ce qui dynamise, ce qui sent bon, ce qui donne un bon esprit, un sens à la vie c’est l’amour, cet amour cependant si difficile à vivre entre conjoints, parents, enfants, amis, frères, à cause de notre nature blessée, foncièrement égoïste, repliée sur elle-même.
Alors voilà que Dieu, pour nous apprendre à aimer, pour nous permettre d’aimer, pour nous donner de vivre comme Lui vit, pour nous donner d’aimer comme Lui aime, Dieu nous fait le don de Son Esprit.
En recevant cet Esprit Saint, l’Église, chaque baptisé par son Baptême, sa Confirmation, ses Confessions, ses Eucharisties, et particulièrement aujourd’hui l’Eucharistie de la Pentecôte (mémorial liturgique qui nous relie mystérieusement à ce jour décrit par les Actes des Apôtres), reçoit un surplus de grâce, un surplus de Dieu, un surplus de Son Esprit, un surplus de Son Agapè, de cet Amour vivant, de cet Amour qui se manifeste comme dit Saint Jean. Il n’y a pas d’autre mot pour définir l’Être de Dieu que le mot d’Agapè qui, précisément signifie la manifestation de l’Amour. C’est la théophanie de la Vie de Dieu !
« Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres… »
Voilà qu’en recevant l’Esprit Saint, si j’ouvre mon âme bien entendu, je vais pouvoir aimer, poser cet acte qui définit, qui valorise ma personne, qui la réjouit, qui la construit.
Je vais pouvoir le poser comme Dieu le pose, avec la même transparence, la même gratuité, la même pureté, le même désintéressement, la même profondeur que Dieu l’a posé, que Dieu le pose sur chacun d’entre nous, que Jésus le pose sur chacun, chacune d’entre nous.
Si je le souhaite, et il faut prendre conscience de cette possibilité, je peux dès aujourd’hui, poser un acte d’amour, ne serait-ce qu’une seconde, sur mon enfant, sur mon mari, sur ma femme, sur mon frère, sur mes amis, sur mes paroissiens, sur mon curé, comme Dieu à travers Jésus pose le même regard d’amour ! Comme Il a aimé Pierre, comme Il a aimé Madeleine, comme Il a aimé la Vierge, comme Il a aimé Matthieu, Zachée, comme Il a aimé le jeune homme riche : « Jésus le regarda et l’aima. »
Quel don merveilleux dont nous devrions apprendre à profiter pour reconstituer, reconstruire, reforger, ressouder, nos familles, nos communautés et donc nos propres personnes.
« Nous sommes membres les uns des autres. »
C’est parce que l’Église reçoit cette âme de Jésus, cet Esprit de Jésus qui l’a poussé, depuis l’Incarnation jusqu’à la Croix en passant par le désert, à se donner, non seulement en miracles, non seulement en enseignement, mais à se donner Lui-même jusqu’à la mort, (disant à Ses apôtres : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime »), c’est parce que l’Église reçoit cette même impulsion, ce même Esprit, qu’elle est véritablement, comme le rappelle Paul, le Corps uni à la Tête, le Corps qui agit comme la Tête.
Comme dans notre personne le corps et la tête ne font qu’un parce qu’il y a la même sève, le même sang, la même âme, le même esprit, qui passent de l’un à l’autre, c’est Jésus, la Tête, qui par Son Esprit influe, presse dans Sa charité tout le mouvement du Corps, des membres que sont tous les baptisés. Quel don fabuleux !
« Je suis avec vous jusqu’à la fin du monde. »
Et pour nous faire bien prendre conscience de ce cadeau de Dieu, Dieu Lui-même. par Luc, nous fait un récit pittoresque, détaillé, précis de ce jour extraordinaire de la Pentecôte.
Ce n’est pas un mythe, ce n’est pas un accident ; c’est pour nous montrer quel est le sens de ce don, que Luc va donner tous ces détails physiques, pour décrire ce qu’il y a de plus pneumatique, de plus spirituel dans le don du Saint Esprit.
« Soudain vint du ciel… » Le Ciel, cet endroit fait pour recevoir nos humanités (comme nous l’avons vu il y a quinze jours), c’est l’endroit où Jésus vient de monter. Les apôtres ont encore dans les yeux l’image du Christ qui part du mont des Oliviers et monte vers le Ciel. Souvenons nous de l’Ascension : « Galiléens, pourquoi restez-vous à regarder vers le ciel ? »
Et c’est du Ciel que tombe ce bruit pour bien nous montrer l’échange entre la présence de Dieu dans le Fils qui s’en va, et d’autres présences de Dieu. Le Ciel, la demeure de Dieu, s’ouvre pour descendre et Dieu nous dit : Je me fais ainsi présent au monde d’une autre présence, ce n’est plus dans la chair de mon Fils, mais Je suis, par mon Amour, avec vous.
« Vous le connaissez car il est en vous, avec vous, à côté de vous… »
Cette présence est une présence douce, spirituelle, comme le vent qui entoure les réalités, sans les pénétrer, sans les violenter, sans les faire éclater. C’est le vent qui tourne autour de l’arbre, autour de la maison, autour de la plante ; c’est le vent qui nous rafraîchit…
C’est une présence de surabondance : « Le vent qui emplit toute la maison »… C’est l’Esprit qui emplit toute l’Église, qui n’oublie personne, du plus jeune au plus âgé. L’Esprit emplit toute l’Église pour ensuite, à travers l’Église, remplir tout l’univers. « L’Esprit du Seigneur remplit toute la terre », dit le psalmiste, d’une présence douce qui se moule autour de la réalité, qui ne la violente pas, qui la caresse, qui la console. Comme Dieu s’est moulé d’abord dans la parole humaine, puis ensuite dans la chair de Marie, puis ensuite dans le Pain eucharistique, voilà que l’Esprit Sanctificateur et Consolateur se moule autour de l’univers, vient, embrase, embrasse tout.
Mais c’est aussi une présence forte comme le précise Luc : « un violent coup de vent. » Un souffle violent par lequel Dieu me dit : Je suis présent avec toi comme consolateur, oui, mais Je suis présent avec toi d’abord pour te défendre par Ma force (la force de Mon bras dit l’Ancien Testament). Dieu est le défenseur de l’homme.
L’Esprit Saint est Consolateur, l’Esprit Saint est Défenseur, et l’Esprit Saint est surabondant. Il n’a aucune mesure, aucune limite.
« Chacun d’eux les entendait dans sa propre langue… »
Et comme si cela était insuffisant pour décrire Son cadeau voilà que Dieu fait agir le feu. Pour nous préciser encore une fois que, comme le feu dévore tout, l’Esprit dévore tout, l’Esprit n’oublie rien ni personne. L’homme a l’expérience du feu, il sait que le feu n’épargne rien. De même l’Esprit de Dieu n’oublie personne et Il passe partout pour purifier la moindre des mauvaises herbes de notre âme.
Et puis le feu c’est aussi la lumière qui chauffe, la lumière qui purifie.
Le feu est surtout le signe employé par l’homme depuis les premiers âges pour exprimer l’amour, l’amour qui me consume pour celui que j’aime, l’amour qui me pacifie parce que je ne suis plus à moi mais je suis à l’autre. Et l’amour, comme nous le savons, c’est ce qui éclaire notre vie parce que notre but qui est le bonheur de celui que nous aimons. Alors, par ces langues de feu présentes sur la tête des apôtres, Dieu nous dit tout simplement que c’est le don de Son Amour qui purifie, qui consume, qui consomme, qui donne la vie, qui pacifie, qui nous unifie, qui éclaire la vie et la remplit de joie !
Demandons la grâce de comprendre, c’est-à-dire de prendre avec nous ce don de Dieu ! Il fera de nous des étincelles participant de la même Force divine que le Feu du Buisson ardent symbolisant Dieu ! Il fera de nous des sources d’amour, des fleuves de bonté et de miséricorde. Sachons recevoir et sachons répandre cette « eau vive qui coule de son sein » ! Sachons donner ce Don et allumer ce Feu d’Amour autour de nous pour embraser le monde en brûlant nos égoïsmes !
Mgr Jean-Marie Le Gall
Aumônier catholique
Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.
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