Lectio Divina du 2eme dimanche de l’Avent
SE METTRE DANS LA LUMIERE POUR ACCUEILLIR LA LUMIERE
Le deuxième dimanche de l’Avent précise en soulignant ce que nous avons contemplé la semaine dernière. Il accentue notre joie et notre espérance dans la venue du Seigneur. Il accentue aussi notre prise de conscience du péché qui encombre notre âme et qui la ronge. Il nous fait comprendre enfin que « c’est par la Lumière que nous verrons la Lumière » comme dit la Parole (Ps 35, 10).
La miséricorde, c’est le Cœur de Dieu qui se penche sur ma misère
La première lecture est l’hymne du Livre de la Consolation dans lequel Yahvé demande à Son prophète de consoler Son peuple, dans le but de développer notre espérance et notre joie. Non seulement Dieu va venir, comme nous l’avions déjà remarqué dans les lectures de dimanche passé, mais Il va venir avec délicatesse : Il va venir en tant que pasteur. Dieu va se faire le berger de l’homme et Lui-même chercher Sa brebis : « J’irai chercher ma brebis, je la porterai sur mes épaules, je vais conduire mon troupeau. » Cette petite phrase exprime, non seulement le pardon de notre crime – « Dis à Jérusalem que son crime est pardonné, que son service est accompli » – mais quelque chose de plus subtil, une réalité proprement divine : la miséricorde, qui dépasse le pardon parce que la miséricorde est cette vertu de Dieu qui fait que Dieu est attiré par notre misère ; le cœur de Dieu est aimanté par les blessures de la brebis. Voilà le double motif qui accroît notre joie et notre espérance dans la venue de Jésus : non seulement Dieu vient, mais Il vient comme bon pasteur ; Il vient avec Sa miséricorde, Il vient me chercher et me prendre sur Ses épaules.
Il y a même un troisième motif : Isaïe nous rappelle que le trophée de Sa victoire le précède. Yahvé vient déjà avec le symbole de Son triomphe : l’homme, l’homme accompli. Dieu vient avec ce pour quoi Il est venu : notre humanité renouvelée par Jésus-Christ Fils de Dieu, l’Homme Parfait. Dans cette simple lecture d’Isaïe, nous avons donc à la fois : d’abord le passé qui est effacé – le péché, puis nous avons le présent que Dieu me montre dans Son Amour quand Il vient me voir, quand Il vient pour me prendre, pour panser mes blessures. Et ensuite, nous avons l’avenir, ce pour quoi je suis fait : l’état d’homme en plénitude.
Plus je m’approche de la Lumière, mieux je vois mon obscurité
Nous avons médité pour le premier dimanche de l’Avent que, plus notre péché s’en allait, plus la Lumière intérieure qui est en nous, Jésus, brillait aux yeux des hommes. Aujourd’hui, le point de vue change et nous disons : plus la Lumière arrive, plus notre espérance se concrétise, plus Dieu approche, plus Jésus se fait présent et plus mon péché se montre comme une obscurité, comme une poussière qui opacifie mon être. C’est normal : plus je m’enfonce dans la contemplation de Dieu plus les poussières ressortent en contraste de Sa Lumière. Les quelques fautes décelées rapidement dans ma vie chrétienne deviennent alors pour moi, à la lumière de Jésus, des véritables manques d’amour qu’il faut déraciner. C’est en cela que ce dimanche précise et accentue l’enseignement liturgique de dimanche dernier.
C’est pour cela que Dieu me donne du temps, comme le rappelle Pierre dans sa deuxième épître. Le temps est un don de Dieu pour que je me donne à Dieu. Le temps ne m’appartient pas. Le temps est une grâce de Dieu : grâce de Sa patience pour laisser à chacun le temps de sa conversion. Le temps de l’Avent est spécialement donné pour nous préparer à recevoir Jésus dans la crèche de notre âme, par Sa grâce liée au mystère de Sa naissance dont la Liturgie fera mémorial.
Désirer voir toutes choses en Dieu
Cette préparation se fait dans le désert « Préparez le chemin du Seigneur dans le désert » crie le prophète, injonction reprise par le Baptiste pour me préparer à la rencontre de Jésus. Il faut que j’entre dans le désert. Je dois me fixer sur l’essentiel de ma vie : le rapport de mon âme à Dieu et à mes frères, sans être arrêté par les tâches présentes comme disait la collecte. Ne pas être arrêté par notre quotidien : c’est simple, mais pas facile… Il s’agit de convertir ma vie à Dieu. Nous resterons au travail, nous resterons en famille avec nos soucis et nos joies, nous resterons dans cette construction du monde, mais avec un cœur nouveau qui nous fera voir ce monde à la lumière de Dieu. C’est pourquoi Yahvé dit : « Parlez au cœur de Jérusalem. » C’est la conversion du cœur qui importe. Il faut arriver à voir toutes choses en Dieu.
Il me faut demander cette intelligence du cœur qui consiste à rester dans ma vie pour en faire une vie de Dieu en moi et être ainsi sacrement de Sa présence dans le monde. C’est la difficulté de l’Incarnation. Nous croirions volontiers à un Dieu restant dans Ses nuages… Il est plus difficile de croire à un homme qui est Dieu pour que l’homme soit divinisé dans sa vie quotidienne, dans ses soucis, dans son devoir d’état, dans ses tâches.
Vivre dans la simplicité de la vérité divine
Comment nous préparer ? Comment réorienter un peu plus notre vie ? Il faut « aplanir la voie du Seigneur, rabaisser les montagnes, combler les ravins, raboter les escarpements … «
Il faut rabaisser les montagnes de mes orgueils, tuer ce chiendent intérieur qui me mange : « Qu’as-tu qui ne t’ait été donné ? » dit Paul, « de quoi te glorifies-tu alors? » De ton nom, de ta richesse, de ton pouvoir, de ta famille, de ton intelligence ? Tout est don de Dieu, Tout est grâce.
Il faut, et c’est encore plus subtil, combler les ravins. Nous avons dans notre vie des ravins, que le Christ ne peut pas passer pour s’emparer de toute notre personne. Nous avons des pièces secrètes fermées à double tour. Il faut combler les ravins de manière à ce que Jésus puisse demeurer en toute notre personne. Toutes nos facultés doivent être chrétiennes et s’exercer ainsi tous les jours et pas seulement le dimanche !
Puis, il faut raboter les escarpements, les pointes, les arêtes de notre caractère, souvent inconscientes il est vrai, mais qui sont toujours une défense aux attaques que nous croyons recevoir du fait de notre susceptibilité maladive…
Enfin, ces chemins tortueux qu’il nous faut redresser. Entrons donc dans la simplicité et la vérité de Dieu ! En Dieu tout est clair. Chez les saints, il n’y a pas d’ombre, tout est transparent. Alors que nous… nos mondanités, nos combinaisons pour avoir l’air de… tout en ne faisant pas …, dire oui tout en pensant non… Que de complications dans nos relations sociales qui finissent par créer un climat d’hypocrisie et même de mensonge ! Ce qui est, est, et ce qui n’est pas, n’est pas ! « Que votre oui soit oui et que votre non soit non, disait Jésus, tout le reste vient du Mauvais. »
L’efficace apostolat de la conversion
Retenons ceci pour conclure : c’est dans la mesure où nous aurons laissé entrer en nous un peu de Sa Lumière purificatrice que l’on verra en nous « la Gloire de Dieu » comme dit le prophète. Les hommes verront l’œuvre de Dieu en nous et ils reconnaîtront que « la bouche de Dieu (c’est-à-dire Sa Parole) est efficace ». Ils reconnaîtront que nous, chrétiens, cherchons, trouvons et avons la possibilité de devenir meilleurs. C’est la seule manière de convertir à Jésus.
Mgr Jean-Marie Le Gall, Aumônier catholique H.I.A Percy, Clamart
@mgrjmlegall