Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« Comme des nouveaux-nés ont soif du lait, soyons avides de la Parole ! »

Lectio divina pour le Dimanche de Pâques, le 23 avril 2017

Avec Simon de Cyrène, la Liturgie des Rameaux, nous invitait à laisser Jésus placer Sa croix au cœur de nos souffrances pour les rendre rédemptrices. Avec Pierre nous avons réappris, le Jeudi Saint, à faire mémoire de la charité eucharistique et du service fraternel pour communier au flux d’Amour qui traverse toute la vie du Christ pour exploser à la Croix. Avec Barabbas, nous avons accepté l’admirable échange qui nous a libérés le Vendredi Saint et nous a permis de dire non à la tentation de faire mourir encore Dieu par notre amour propre.

 

Marie l’absente…

Regardons, durant le Temps pascal, Marie qui n’est pas là… Marie, absente, comme elle le fut déjà de la Liturgie de Pâques ! L’Immaculée, Reine du silence depuis le Samedi Saint, dont l’absence peut sembler d’autant plus cruelle que les maculés sont là, eux : Madeleine la pécheresse, Pierre le renieur et les dix autres lâches…

Marie, absente, pour nous rappeler que seul l’œil de la foi peut saisir l’œuvre de l’Esprit dont la puissance ressuscite Jésus qu’Il incarna trente-trois ans plus tôt dans son sein virginal. Marie, l’absente, pour mieux souligner que le véritable lieu où contempler la Résurrection du Fils, c’est le cœur de chaque homme illuminé par la foi.

Une Incarnation nouvelle, et dans la Gloire divine…

Marie… Marie dont l’absence nous renvoie ainsi au mystère de l’Incarnation que la Résurrection de l’Homme Nouveau vient achever en perfection. Car la Résurrection de Jésus est une nouvelle naissance, comme une nouvelle Incarnation. Non plus dans la chair de l’homme pécheur mais dans la Gloire du Dieu trois fois Saint.

C’est, au sens propre de la parole, l’apothéose humaine, l’homme entrant chez Dieu… C’est à cet instant précis, en effet, que s’accomplit la parole du Christ : « Je suis la Résurrection et la Vie… », parole que non seulement Il nous délivre, mais qu’Il nous livre au sens fort du terme : « Qui croit en moi, même s’il meurt, vivra », « Qui marche à ma suite aura la lumière de la Vie » !

Marie et notre engendrement à la Vie…

Parce que la Résurrection est aussi notre incarnation à la vie éternelle, Marie est là comme Mère aussi pour ce mystère. La première, dans la foi pure que signifie son absence à l’Évènement pascal, elle réalise en elle ce qui a été vécu par son Fils ressuscitant. Selon l’expression forte de l’apôtre Paul : elle devient vivante pour Dieu en Jésus. (Rm 6, 11) Marie par sa foi au Fils et dans l’Esprit s’engendre à Dieu, ce Dieu qui s’était engendré en sa chair.

Et c’est parce que la première, elle s’est engendrée à cette vie nouvelle que Marie préside désormais à la naissance à la Vie divine de chaque baptisé : Mère voici tes fils! Si nous sommes appelés à devenir vivants pour Dieu en Jésus, c’est à sa suite et en elle, dans sa foi matricielle que l’Église assume et proclame. « Fils voici ta Mère ! » À la suite et dans la foi de la Genitrix Vitæ, nous devons mettre tout en œuvre pendant ce Temps pascal pour nous engendrer dans l’Esprit à Dieu et par notre foi au Christ, Lui qui s’est donné à nous par l’Esprit, dans notre chair.

« Comme des nouveaux-nés… »

Nous sommes des éternels nouveaux-nés ! En effet, année après année, à chaque célébration du mystère pascal, nous nous rendons compte combien nous ne faisons pas suffisamment cas des grâces du Salut qui nous sont proposées… Dit autrement, nous sommes conscients combien notre âme est un abîme encore bien peu rempli de la Vie divine et qu’il serait avantageux pour notre vie de nous abreuver du lait spirituel que Dieu nous offre pour grandir, Lui, en nous. Aussi sommes-nous heureux de célébrer ce dimanche in albis au cours duquel les néophytes déposaient leur aube blanche en chantant : « Comme des nouveaux-nés ont soif du lait nourricier, soyons avides du lait de la Parole »… Oui, soyons avides de cette Parole qui a son efficace pour exalter le Seigneur en notre cœur, à la suite de la Vierge Marie.

« Tous ceux qu’anime l’Esprit sont fils de Dieu… »

Car c’est là le fruit du mystère pascal : renaître à la Vie en révélant en nous le Fils. C’est pour cela que nous avons été baptisés en Son sang : pour recevoir Son Esprit qui nous transformera peu à peu en Son image, ainsi que la collecte nous le fait comprendre à la suite de saint Paul. Quelle miséricorde le Père nous fait-Il en nous invitant à cette imitation, en nous donnant pour cela Sa puissance qui nous garde dans la confiance !

Cette puissance dont parle l’apôtre Pierre, c’est Son Esprit qui est également Celui du Fils et qui les unit l’Un à l’Autre dans une adhésion sans faille, dans une substantielle communion d’amour, dans une confiance infiniment parfaite ! Quelle joie de pouvoir ainsi rejoindre la Vie trinitaire, nous insérer en Elle, en étant nous-mêmes d’autres fils, attachés au Père des Cieux par le même Esprit d’Amour !

« Recherchez les réalités d’En-Haut… »

Soyons des contemplatifs de ce nimiam caritatem, de cet Amour si grand, voire « trop grand » pour reprendre l’expression étonnée de Paul qui plaisait tant à Sainte Elisabeth de la Trinité… C’est la contemplation sans fin de cette vocation du chrétien aimant le Christ et croyant en Lui sans L’avoir vu qui transfigure son cœur par la Joie inexprimable de Dieu : « Ô mon Dieu, Trinité que j’adore, ensevelissez-Vous en moi, faites de moi Votre demeure aimée et reposante, pour que je m’ensevelisse en Vous, mon Océan d’infinie béatitude ! » Faites de moi un bienheureux désirant toujours plus Vous croire sans avoir vu autre chose que les fruits de Votre Résurrection dans le cœur des hommes qui Vous reçoivent !

« La Paix soit avec vous ! »

Si nous sommes établis dans la Paix du Ressuscité, c’est par la contemplation de ce qui nous attend et qui déjà se réalise en nous lorsque nous accueillons le Vivant venu nous relever de nos peurs et nous délivrer de nos craintes. En ouvrant la porte de notre cœur au Christ ressuscité, nous faisons entrer Sa Paix en nous et nous donnons à notre vie son sens définitif. Nous devenons des porteurs de paix construisant une communauté spirituelle, pneumatique, où les membres se trouvent unis par ce lien de la paix. Ce qui vit en nous et passe de proche en proche en nos frères, c’est l’Esprit de paix qui fait l’unité des croyants en faisant tomber les murs de la division et en ouvrant les fenêtres du pardon.

« Appliquez-vous à conserver l’unité de l’Esprit par ce lien qu’est la paix. »

C’est l’Esprit de paix qui nous fait en même temps prier le Père, vivre en communion et rompre le Pain du Fils dans l’unité des cœurs, partager enfin nos biens personnels pour se secourir mutuellement dans l’Amour. Il n’y a pas de véritable résurrection personnelle sans l’édification du Temple de Dieu qu’est l’Église. Comme il n’y a pas d’insertion baptismale du croyant dans le Christ sans son insertion dans le Corps mystique.

C’est ainsi que nous vivons et grandissons « d’un seul cœur », même en étant physiquement éloignés les uns des autres. L’Église n’est pas une géographie, elle est un Esprit qui se répand et se communique par chaque chrétien envoyé comme le Christ par le Père pour dire Sa miséricorde et inviter chacun à accéder à Son pardon.

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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