Ne connaissant pas son Père, l’homme s’inscrit dans un monde de peur…
Donc le Christ vient à la suite d’Elisée pour parachever cette manifestation. A la suite d’Elisée, le Christ vient pour guérir l’homme annoncé par Naaman et qui est représenté par ces dix lépreux.
Il vient pour délivrer l’homme de sa prison. L’homme est emprisonné parce qu’il ne connaît pas Dieu, il n’a pas perçu encore, avant Jésus-Christ, cette puissance du Dieu créateur et aimant. Il n’a pas encore perçu, avant Jésus-Christ, que Dieu est Père et qu’il est aimé de ce Père de manière infinie et tout à fait personnelle.
Donc l’homme est prisonnier et comme il ne connaît pas cet Amour de Dieu, comme il ne connaît pas cette paternité de Dieu, -et nous en savons quelque chose dans notre histoire tant universelle que personnelle- l’homme s’inscrit dans un monde de peur, de crainte. Si nous nous interrogions à brûle-pourpoint sur ce qu’est le monde et sur ce qu’est l’histoire humaine nous aurions très probablement une réponse pessimiste : le monde de la haine, le monde de la violence, le monde du meurtre, le monde de l’égoïsme, et nous n’aurions pas tort…
Dieu est notre Abba !
Mais au-delà de cette constatation il y a quelque chose de beaucoup plus profond que le Christ justement vient révéler à l’homme : c’est la relation de l’homme à Dieu : l’existence de Dieu en tant que Créateur et Père. Jésus ira même jusqu’à appeler Dieu Son Père : « Abba », c’est-à-dire : Papa ! Dieu est notre Abba. Et c’est cela qu’est venu révéler le Christ ; c’est comme cela que le Christ est venu délivrer l’homme : en lui apportant la connaissance du vrai Dieu, c’est-à-dire la connaissance de ce Dieu nous aimant car notre Père, nous proposant de vivre avec chacun de nous une relation de père à enfant !
Et c’est là tout l’effet du Baptême ! Lorsque nous venons amener l’enfant au prêtre pour qu’il le baptise, c’est pour le faire entrer dans cette relation d’amour et de paternité. L’enfant ne sera pas pour autant protégé au sens magique du mot. Les chrétiens sont, comme tous les hommes, soumis à l’épreuve, aux difficultés de la vie, à la mort, à la souffrance… Mais nous savons que tout cela nous pouvons le vivre dans une relation supérieure qui va illuminer jusqu’à transformer ces faits de notre vie quotidienne pour les assumer et les replacer dans une relation beaucoup plus profonde, la relation unique, la relation essentielle de notre âme à Dieu.
« Maître guéris-nous, aie pitié de nous. »
Mais comment Jésus va-t-Il délivrer l’homme ?
Jésus sait que l’homme, malgré sa faiblesse, malgré sa nature pécheresse, fuit son mal et qu’il est à la recherche d’une guérison. La preuve : ces lépreux qui marchent à la rencontre de quelqu’un.
Car qui peut nous sauver de la prison si nous sommes emprisonnés ? Nous devons faire appel à quelqu’un de l’extérieur qui viendra nous ouvrir la porte de notre prison. C’est Jésus, c’est Dieu qui vient sur notre route, c’est Dieu qui vient dans notre monde, c’est Jésus qui passe de Judée en Galilée et qui n’hésite pas à traverser cette région idolâtrique et hérétique qu’est la Samarie.
Jésus est toujours à notre recherche, Jésus est toujours sur notre route ! A nous de savoir Le chercher, à nous de savoir Le voir ! A nous de désirer Son intervention comme ces lépreux qui veulent sortir de leur prison et qui vont faire appel à Celui qu’ils appellent Maître : « Maître guéris-nous, aie pitié de nous. »
Jésus nous libère par la Croix !
Alors comment Jésus va-t-Il ouvrir la porte de nos prisons respectives ? Par le don de Sa vie sur la Croix !
Et comment allons-nous pouvoir passer la porte de notre prison, faire le geste d’accueillir ce Salut, manifester que nous sommes libres et que nous avons désiré cette liberté et que nous voulons la mettre en pratique ? Comment allons-nous faire ?
Par le Baptême. C’est pour cela que le rite du Baptême commence par la signation du front de l’enfant par la croix. La Croix est le signe efficace qui ouvre la porte de notre prison, de l’homme pécheur, de l’homme ignorant de l’Amour de Dieu.
Et le Baptême est la réception, l’accueil, le « oui » que nous faisons à cette libération du Christ. Par la Croix le Christ manifeste et nous donne l’Amour de Dieu. Et par le Baptême, j’accueille, j’accepte de recevoir cet Amour ! Ce qui n’est pas toujours facile… Regardons nos vies quotidiennes : quelquefois nous avons du mal à recevoir l’amour de quelqu’un, cela nous blesse dans notre dignité (ou ce que nous croyons être notre dignité !), dans notre orgueil, dans notre esprit d’indépendance… Oui c’est quelquefois difficile de recevoir du bien !
Donc le Christ nous donne cet Amour par la Croix et nous, nous Le recevons par le Baptême. C’est toute la symbolique de ce mouvement des lépreux : il y en a un qui revient car il a eu conscience de l’Amour de cet homme qui l’a guéri ; il revient pour reconnaître et dire qu’il n’est plus dans la prison, mais qu’il s’élève déjà dans son humanité, dans son corps et dans son âme, il s’élève dans une autre vie.
Le prêtre nous découvre le vrai visage du Père !
Nous aurons remarqué que le Christ renvoie aux prêtres : c’est par l’Eglise que se fait le « passage de témoin » de l’Amour de Dieu, entre la Croix et le Baptême. Il faut le prêtre, mais ce n’est pas le prêtre, ce n’est pas la force du prêtre dira Elisée. Et d’ailleurs les lépreux sont guéris avant même d’être allés jusqu‘au prêtre ! Mais Dieu a besoin du prêtre pour laver nos âmes.
Voilà donc que ce lépreux revient parce qu’il accepte d’être guéri par un autre, pas par lui-même ! Il ne sait d’ailleurs même pas par qui puisque c’est sur la route que cela se passe, ce n’est même pas en offrant un rite de purification au Temple ! Il ne sait pas d’où cela vient, mais il prend ce cadeau. Il prend ce don qui va renouveler sa vie : il accepte et alors là il est immergé dans la vie de Dieu ! C’est une véritable révolution du regard. Cet homme lui découvre le visage de son Père, et lui qui était un Samaritain, un étranger, un idolâtre, est guéri par le Maître d’Israël au nom de Yahvé ! Il vient se jeter aux pieds de Jésus et il glorifie Dieu.
« Viens, relève-toi, marche, ta foi t’a sauvé ! »
Maintenant ce lépreux porte sur Dieu un regard totalement nouveau.
Et donc il porte aussi un regard nouveau sur lui-même et sur les autres. Notre immersion par le Baptême dans la Vie divine, dans la Vie de Jésus-Christ, nous transforme, nous fait comprendre ce qu’est l’Amour de Dieu pour chacun d’entre nous et nous fait, comme Il dit, glorifier Dieu.
Attention ! Ce n’est qu’une étape, ce n’est pas magique. Nous voyons ce que dit Jésus dans l’Evangile : « Viens, relève-toi, marche, ta foi t’a sauvé. » Il faut donc que chacun de nous se relève après le Baptême et marche dans la vie, sur la route à la suite du Christ.