Lectio divina
Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.
« Les ouvriers sont peu nombreux et pourtant la moisson est abondante ! »
Lectio divina pour le 4ème Dimanche de Pâques, le 7 mai 2017
L’épître aux Hébreux nous donne une définition théorique très juste de la fonction sacerdotale disant que le prêtre, le sacerdos, (qui vient du mot grec hiereus), est celui qui est ministre de la liturgie sacrée. L’auteur de l’épître aux Hébreux dira: « Le prêtre est celui qui est établi pour intervenir en faveur des hommes dans leur relation avec Dieu, pour le sacrifice et le pardon des péchés. »
Le prêtre, un homme pour les hommes…
Le prêtre est celui qui sert, -il est ministre-, mais il ne sert pas n’importe quoi. Il est établi en faveur des hommes, pour les hommes, dans leur relation à la divinité afin d’être le pont, le religieux, c’est à dire celui qui relie les hommes et leurs dieux, le ciel et la terre. Il fait monter de la terre vers le ciel les sacrifices des hommes pour la purification des fautes, et pour ce faire, il doit participer -dans une certaine mesure- à la vie de la divinité pour la rendre accessible, présente aux hommes qui la vénèrent.
Dans la pratique, le prêtre s’avère comme étant quelqu’un qui donne sa vie aux hommes, qui leur consacre son existence. Il donne son temps, ses qualités, ses défauts aussi, malheureusement !
Il est appelé aussi à donner sa vie pour les hommes : il se donne afin que les hommes puissent élever vers Dieu leurs prières, leurs demandes comme leurs louanges d’action de grâce.
Jésus, Médiateur unique entre Dieu et les hommes…
Le sacerdoce d’Aaron entre déjà parfaitement dans cette catégorie. Mais cette définition du sacerdoce ne s’applique-t-elle pas aussi parfaitement à Jésus ?
Jésus n’est-Il pas, comme nous le rappelle saint Paul, le Médiateur unique entre Dieu et les hommes, celui qui fait le pont, le lien, en un mot, le grand religieux du Père qui relie la Vie éternelle à la vie terrestre ?
Jésus n’est-Il pas, comme tout prêtre le sera en Lui, un pasteur pour reprendre le mot de l’évangile, c’est-à-dire quelqu’un qui se dévoue à son troupeau pour le nourrir et le mener à la vie dans les pâturages ?
Jésus, plus que tout autre prêtre, partage la vie de Dieu. N’est-Il pas celui qui, par excellence, connaît Dieu, comme le rappelle Jean dans son prologue. « Nul n’a jamais vu le Père, le fils unique qui est dans le sein du Père, Lui, nous l’a fait connaître. » Jésus plus que tout autre prêtre nous révèle cette Vie, nous la fait partager, et par ce partage nous la donne : « Celui qui croit en moi, celui qui croit en mes paroles, aura la vie. »
Jésus plus que tout autre prêtre, non seulement donne la vie, mais donne Sa vie. Il se consacre pour les hommes. Nous nous souvenons de la prière sacerdotale de Jésus au chapitre 17 de Jean : « Je me consacre pour eux, pour qu’ils aient la vie » c’est-à-dire pour qu’ils soient eux aussi consacrés dans la Vie divine : vivifiés par elle, dévoués à la transmettre. Jésus est le Grand Prêtre pour l’éternité.
Il accomplit si parfaitement cette fonction sacerdotale que l’on peut dire l’Ancien Testament tout orienté vers ce sacerdoce unique : Jésus est le seul prêtre véritable, le prêtre parfait, le prêtre dans l’absolu qui, par Son sacerdoce unique sauve tous ceux qui croient en Lui.
« Par une oblation unique Jésus a rendu parfaits ceux qu’Il sanctifie… »
Mais alors, puisque Jésus est le seul prêtre qui remplit parfaitement, totalement et à jamais la fonction sacerdotale, puisqu’Il est non seulement le représentant de Dieu, mais Dieu Lui-même qui vient faire le lien entre l’homme et Son Père, puisqu’Il donne Sa vie aux hommes et pour les hommes, puisqu’Il donne la Vie sur la croix, à quoi servent donc les prêtres de notre Eglise ?
Nous avons entendu dans l’évangile que Jésus est venu pour donner la vie, et pour que les hommes aient la vie en abondance, c’est-à-dire que les hommes aient toute la Vie et que tous les hommes aient cette Vie de Dieu. Il faut donc, dans le flux des générations, que le sacerdoce du Christ soit poursuivi afin que la grâce touche tous les temps de toute l’histoire. Plus exactement, il faut que Son sacerdoce, puisqu’il est unique, soit rendu présent dans Sa plénitude et Son efficace. Il faut qu’il soit rendu présent, actualisé, diffusé sous tous les cieux, à toutes les époques, afin que la Rédemption qui lui est liée puisse atteindre tous les hommes ! Nous vivons de la grâce, nous sommes nourris par la grâce de la même manière, que Pierre, que Jean, que Marie, que tous les saints de la première Eglise, que tous les baptisés de l’Eglise de tous les temps qui nous ont précédés, et de tous les temps qui suivront.
Voilà quelle est la fonction du sacerdoce de la Nouvelle Alliance qui n’est pas un autre sacerdoce, mais qui est le sacerdoce participé du Christ, unique médiateur entre Dieu et les hommes, afin de Le rendre présent à tous et à jamais pour la Rédemption de l’humanité.
« Je Suis le Bon Pasteur. »
C’est pourquoi, comme celui de Jésus, le sacerdoce de l’Eglise n’est pas une qualité que le prêtre peut s’attribuer, ce n’est pas une fonction qu’il a choisie de lui-même : « Nul ne s’arroge cette dignité » dit l’auteur de l’épître aux Hébreux. Ce fut vrai pour le Christ, c’est vrai pour les serviteurs que sont les prêtres.
On aura remarqué que, dans l’introduction du discours du Bon Pasteur, Jésus ne se prononce pas comme étant le Pasteur. Ce serait une révélation trop grande pour les oreilles apostoliques, d’annoncer que Dieu Lui-même est prêtre dans Son Incarnation !
Les apôtres ont vécu dans la spiritualité du sacerdoce d’Aaron, de celui qui est représentant de Dieu, ‘lieu-tenant’ de Dieu, celui qui parle au nom de Dieu, celui qui est guide au nom de Dieu, prophète, juge, prêtre. Et voilà que Jésus au verset 11, juste après notre passage va déclarer : « Je Suis (c’est-à-dire Yahvé) le Bon Pasteur. » Aussi, avant de faire cette déclaration fulgurante, Il prépare Ses apôtres petit à petit, dans ces dix premiers versets que nous venons d’entendre. Il les prépare en toute humilité, en parlant de leur sacerdoce à eux. Ce n’est qu’ensuite qu’Il parlera de Son sacerdoce unique.
Et cette unicité du sacerdoce de Jésus découlera logiquement de cette introduction dans laquelle Jésus parle du sacerdoce apostolique, du sacerdoce ministériel dont les prêtres sont les représentants.
« Nul ne s’arroge cette dignité. »
Jésus dit qu’Il est la Porte, qu’Il est le Portier et que c’est Lui qui fait entrer le pasteur. Ce n’est donc pas le prêtre qui se choisit un troupeau comme ce n’est pas lui qui décide de son ordination. Certes, certains hommes entendent au fond du cœur un appel, quelque chose qui les pousse à entrevoir la vie sacerdotale. Mais justement, ce qu’ils entendent vient d’ailleurs. C’est cet appel, cette vocation qui va le faire entrer par la porte qui est Jésus Lui-même dans Son Sacerdoce unique afin qu’il puisse pénétrer dans l’enclos et prendre le troupeau pour l’emmener dans le pâturage de la Vie : « Nul ne s’arroge cette dignité. »
Nul ne se choisit sa paroisse, nul ne se choisit son troupeau dans le sacerdoce de l’Eglise catholique. Les prêtres sont appelés par l’évêque, par l’Eglise, par le Supérieur ecclésiastique. Ils sont appelés à l’Ordination, comme ils seront ensuite appelés à la mission. L’Eglise leur confie une part du troupeau au nom de Jésus, la Porte et le Portier qui leur dit : Viens, entre par moi, entre par mon pastorat unique, entre par mon sacerdoce unique -parce que parfait- pour y participer sur tel et tel troupeau, dans telle et telle paroisse, dans telle et telle ville…
« Venez, je ferai de vous des pécheurs d’hommes… »
Voilà comment Jésus définit le sacerdoce de la nouvelle Alliance par sa caractéristique la plus fondamentale. Le sacerdoce de la nouvelle Alliance est un appel de Dieu sur l’homme. En effet l’homme ne peut s’arroger cette dignité qui a déjà été confiée par le Père au Fils pour qu’Il l’exerce en plénitude : « Tu es mon fils, aujourd’hui je t’ai engendré selon l’ordre de Melchisédech, tu es prêtre. »
Voilà ce qui caractérise le sacerdoce de la nouvelle Alliance : la dépendance, la disponibilité à répondre librement à cet appel que Jésus lance : « Venez, je ferai de vous des pécheurs d’hommes ; et quittant, leurs filets, ils le suivirent. »
« Priez le maître de la moisson pour qu’il envoie des ouvriers à la moisson. »
Alors, en ce 4ème Dimanche de Pâques traditionnellement réservé aux vocations (à cause même de ce texte évangélique), en cette journée durant laquelle toute l’Eglise, se réunit dans une communion autour de l’Eucharistie pour prier pour les vocations, implorons le Seigneur afin que les hommes entendent l’appel du Bon Pasteur : « Les ouvriers sont peu nombreux, et pourtant la moisson est abondante. Priez le maître de la moisson pour qu’il envoie des ouvriers à la moisson. »
Nous sommes tous concernés par cet appel, par cette prière, par cette générosité. C’est dire que nous devons tous participer par notre sacrifice, par notre sainteté, par notre générosité financière (qui aide l’Eglise dans son œuvre de formation sacerdotale), à cette continuation du Sacerdoce unique de Notre Seigneur afin que Dieu puisse toujours et partout être présent par la bonne Parole et Son Eucharistie.
Mgr Jean-Marie Le Gall
Aumônier catholique
Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.
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