Lectio divina
Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.
Marie est chez elle dans la Parole !
Lectio divina pour le 1er janvier – Solennité de Sainte Marie Mère de Dieu
C’est à l’Annonciation que Marie devient Mère de Dieu. Ce Verbe incarné, fruit de ses entrailles, elle Le donnera au monde à la crèche de Bethléem. Elle Le portera à sa cousine d’Aïn Karim et Le présentera au Temple de Jérusalem, figure de l’offrande qu’elle en fera à la Croix, lorsque le Fils sera suspendu comme LE fruit suffisamment mûr pour achever pleinement la Rédemption au sommet d’une décharge d’immondices…
De la Mère de Dieu à la Mère de l’Eglise…
C’est au moment de cette offrande parfaite, lorsqu’elle attendait le salut du monde disait S. Ambroise, que Marie devient Mère de l’Église sans cesser d’être Mère du Christ. Mère de Dieu, Mère de l’Église, le fil rouge qui relie les deux couronnes glorieuses de Marie, c’est sa disponibilité à la Parole, à ce Verbe dont elle fut le réceptacle très pur pour présider ensuite le pèlerinage de foi que l’Église entame à sa suite afin de porter cette Parole vivante au monde.
Qu’il me soit fait selon Ta Parole…
Et si la Solennité de la Mère de Dieu clôture l’Octave de Noël, c’est pour nous inciter à ne pas quitter les grâces de la sainte Nuit sans avoir pris acte de la perle qui en est le cœur : cette disponibilité à la Parole décrite dans le récit lucanien de l’Annonciation et que la mise au monde dans l’étable dévoile de manière encore plus sublime. Car Marie n’est pas seulement alors celle qui reçoit la Parole ; elle devient alors, par la grâce de cette disponibilité parfaite celle qui La donne !
Elle ne La donne pas comme l’on offrirait un livre. Elle La livre dans son actualité la plus brûlante, dans son enveloppe humaine appelée à être engendrée jusqu’aux extrémités de la terre par les membres du Corps qu’est l’Église. Marie, avant son Fils qui se livrera aux mains des pécheurs, nous livre le Verbe qui est sa matrice spirituelle et dont elle est la matrice charnelle. Elle donne vie à l’événement qu’elle a médité si longtemps, et encore en cette heure, en son cœur pour reprendre l’évangile de la messe de l’Aurore : « Marie retenait tous ces évènements et les méditait en son cœur » (Lc 2, 19)
La foi de Marie la fait être pure capacité à la Parole
Arrêtons-nous sur cette osmose parfaite entre la Parole et Marie. Bien qu’étant unie à Elle par toutes les fibres de sa foi, et justement pour cela, Marie donne vie à la Parole. C’est déjà ainsi que l’on a pu définir la maternité de la Vierge.
Quand il est dit que Marie a conçu dans la foi, cela ne signifie pas que la Vierge aurait contribué à part égale avec l’Esprit à la naissance de Jésus. Marie a conçu par la foi, non parce que sa foi aurait été la raison formelle de sa maternité, mais parce que, de son côté, il n’y a rien eu d’autre que sa foi ! La foi de Marie n’est pas l’énergie par laquelle elle a conçu et enfanté Jésus, mais plutôt la disposition grâce à laquelle l’unique énergie de l’Esprit a pu opérer en elle.
Lorsque l’Ange se présente à la Vierge pour lui dévoiler l’attente de Dieu à son égard, elle n’a rien d’autre à proposer et à offrir que dire sa foi parfaite qui fait d’elle une pure capacité de Dieu. Donnant vie à la Parole à cause même de son adhésion à cette même Parole, Marie définit ainsi parfaitement la relation de réciprocité amoureuse, voire complice, que « Dieu parlant » attend de « l’homme écoutant ».
Marie, par son oui à la Parole, accomplit la vocation de l’humanité
L’Exhortation apostolique de Benoît XVI, Verbum Domini, eut la délicatesse de mettre en avant ce mariage mystique entre le cœur de la Vierge et le Verbe divin : « Il est nécessaire de regarder là où la réciprocité entre la Parole de Dieu et la foi s’est accomplie parfaitement, c’est-à-dire en la Vierge Marie, “qui par son ‘oui’ à la Parole de l’Alliance et à sa mission, accomplit parfaitement la vocation divine de l’humanité.” » (Verbum Domini, 27)
Et elle poursuit : « De l’Annonciation à la Pentecôte, [Marie] se présente à nous comme la femme totalement disponible à la volonté de Dieu. Elle est l’Immaculée Conception, celle qui est « pleine de la grâce » de Dieu (cf. Lc 1, 28), docile à la Parole divine de façon inconditionnelle (cf. Lc 1, 38). Sa foi obéissante place son existence à chaque instant face à l’initiative de Dieu. Vierge à l’écoute, elle vit en pleine syntonie avec la volonté divine ; elle garde dans son cœur les événements de la vie de son Fils, en les ordonnant en une seule mosaïque. » (cf. Lc 2, 19.51) (id.)
Marie est la figure de l’Église à l’écoute de la Parole de Dieu
Disponibilité, docilité, réciprocité, maternité sont des termes qui définissent, chacun à sa manière, la relation unique, exceptionnelle, merveilleuse, entre la petite vierge de Nazareth et la Parole créatrice de l’univers entier. Si la fille du Créateur a pu devenir la Mère du Rédempteur, c’est dans cette relation privilégiée que Marie, en pleine liberté, a accepté de construire avec la Parole.
Cela étant, devenue Mère du Sauveur, Marie ne pouvait être que le modèle de ceux qui, ensuite, recevraient les fruits de ce Salut. C’est pourquoi Benoît XVI écrivit dans la même Exhortation : « Elle est la figure de l’Église à l’écoute de la Parole de Dieu qui, en elle, s’est faite chair. Marie est aussi le symbole de l’ouverture à Dieu et aux autres ; de l’écoute active qui intériorise, qui assimile et où la Parole divine devient la matrice de la vie. » (27). C’est dire donc que le chrétien, à l’instar de Marie, doit pouvoir engendrer la Parole à force de La recevoir !
« Ma mère est celui qui écoute ma parole… »
Recevoir et concevoir, telles pourraient être les deux missions du baptisé. Le chrétien doit pouvoir, comme la Mère du Verbe, entrer et sortir de la Parole, être chez lui en Celle-ci et ne finir par ne faire plus qu’un avec Elle, comme il est appelé à ne faire qu’un avec le Christ : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » (Gal, 2, 20)
Ainsi Benoît XVI poursuit : « On voit ainsi apparaître que, dans la Parole de Dieu, Marie est vraiment chez elle, elle en sort et elle y rentre avec un grand naturel. Elle parle et pense au moyen de la Parole de Dieu ; la Parole de Dieu devient sa parole, et sa parole naît de la Parole de Dieu. De plus, se manifeste ainsi que ses pensées sont au diapason des pensées de Dieu, que sa volonté consiste à vouloir avec Dieu. Étant profondément pénétrée par la Parole de Dieu, elle peut devenir la mère de la Parole incarnée. Contemplant chez la Mère de Dieu une existence totalement modelée par la Parole, nous découvrons que nous sommes, nous aussi, appelés à entrer dans le Mystère de la foi par laquelle le Christ vient demeurer dans notre vie. Chaque chrétien qui croit, nous rappelle saint Ambroise, conçoit et engendre en un certain sens, le Verbe de Dieu en lui-même : s’il n’y a qu’une seule Mère du Christ selon la chair, en revanche, selon la foi, le Christ est le fruit de tous. Donc ce qui est arrivé à Marie peut arriver en chacun de nous, chaque jour, dans l’écoute de la Parole et dans la célébration des Sacrements. » (Verbum Domini, 28)
Cet engendrement, par notre foi, de la Parole dans le monde, voici la grâce que nous pouvons demander à la Vierge Marie en ce jour où nous nous réjouissons avec le Ciel de sa maternité divine !
Bonne et sainte année 2017 ! Que la Parole soit chez elle dans nos cœurs et nous transforme ainsi à l’image du Verbe venu nous révéler l’Amour infini du Père pour ses enfants les hommes !
Mgr Jean-Marie Le Gall
Aumônier catholique
Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.
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