Lectio divina
Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.
Devenir pauvres en esprit et riches de cœur !
Lectio divina pour le deuxième dimanche de l’Avent
Poursuivons notre catéchèse liturgique avec ce 2ème dimanche de l’Avent qui offre à nos yeux ce personnage extraordinaire qu’est Jean Baptiste. Dimanche dernier, c’était Dieu lui-même qui attirait nos regards, aujourd’hui c’est le Précurseur. Puis ce sera, dans les prochains dimanches Marie, et pour finir, Jésus…
Nous avions vu dans la Lectio précédente que pour obtenir notre grâce de Noël (qui n’est pas quelque chose d’abstrait, mais de bien défini comme étant l’incarnation intérieure, spirituelle du Fils de Dieu dans notre âme, une nouvelle venue en grâce à l’intérieur de notre humanité à chacun), qu’il fallait désirer cette grâce, tout simplement.
« Qui me voit, voit le Père » !
Le désir suppose la connaissance de la réalité que nous désirons, et suppose aussi l’amour de cette réalité. Pour désirer la venue de Jésus, pour désirer ce mystère liturgique qui nous fait participer au mystère historique de la naissance de Dieu, il nous faut connaître ce mystère, l’appréhender. Il nous faut saisir, derrière les signes de la crèche, de la chair de Jésus, de la maternité de Marie, tout le mystère de Dieu. Il nous faut saisir derrière le visible, l’Invisible, à savoir la filiation divine de Jésus, « Qui me voit, voit le Père » !
Or il n’y a que la foi qui puisse me faire comprendre, accepter, reconnaître, dans l’enfant Jésus le Fils de Dieu. Qu’est-ce que Noël pour un incroyant ? C’est une tradition populaire, folklorique, enfantine, voire légèrement païenne avec le culte de l’arbre qu’on lui associe. C’est tout. Il n’y a pas de présence de Dieu. C’est une fête de famille, une fête de paix, mais ce n’est pas une fête de Rédemption. Il nous faut la foi pour voir Dieu en cet enfant de la même manière qu’il nous faut la foi pour voir Jésus dans l’hostie.
« Demeurez en mon Amour »
Et il nous faut la charité parce qu’il est bien entendu que l’on ne désire que ce que l’on aime. Il ne suffit pas de connaître la réalité, mais il faut l’aimer ! Et il n’y a que la charité qui puisse nous faire aimer la Divine Trinité qui dépasse infiniment les forces de notre cœur naturel. « Demeurez en mon Amour » dira Jésus, demeurez dans cette charité pour pouvoir effectivement, avec ma Vie, avec ma grâce porter sur Mon Père et votre Père le regard que Je porte.
Nécessité donc de la foi et de la charité pour désirer notre grâce de ce Noël 2016.
Et n’est-ce pas le message du Baptiste qui s’adresse aux juifs, aux pharisiens, aux scribes, à l’élite du peuple élu, pour leur reprocher leur manque de foi : « Vous vous prétendez fils d’Abraham, (le père de la foi), or je vous le dis : de ces pierres on peut faire des fils d’Abraham. » N’est-ce pas Jean qui stigmatise également le manque de charité de ces hommes religieux, pratiquants fidèles à leur sabbat, fidèles à la Loi, fidèles à tous les rites: « Produisez du fruit », montrez vos œuvres…
« Convertissez-vous ! »
Mais n’est-ce pas à nous tous, peuple de Dieu, nouvel Israël que Jean s’adresse aussi ? Pour nous faire sentir, à nous qui sommes des fidèles, donc qui pensons vivre de la foi, pour nous faire sentir notre manque de foi justement, et donc en corollaire, notre manque de charité !? Croyons-nous avoir la foi et la charité du Fils de Dieu parce que nous « pratiquons », comme l’on dit en réduisant malheureusement ainsi la vie chrétienne à des observances ?
« Convertissez-vous ! » Voilà le cri du Baptiste qui doit retentir dans nos cœurs aujourd’hui et pour toute cette 2ème semaine de l’Avent. Convertissez-vous ! Tournez-vous vers Dieu ! Oubliez-vous vous-mêmes ! Cessons de porter le regard sur notre personne, pour nous porter sur Dieu ! « Cherchez les réalités d’En-Haut » dira Saint Paul…
La foi est de porter notre regard non sur nous, mais sur Lui. Portons aussi notre amour non sur nous, mais sur Lui et sur les autres : c’est la charité. Laissons-nous illuminer de la lumière divine, vidons-nous nous-mêmes par la charité.
L’Avent est un temps de foi par la réflexion sur la Parole de Dieu qu’il nous invite à faire pour mieux accueillir, à Noël, ce Verbe dans Son incarnation de grâce en l’âme.
Ruminant la Parole, nous devenons féconds de Sa fécondité infinie. C’est pourquoi l’Avent est aussi un temps missionnaire, un temps de fécondité de la charité à offrir dans l’ouverture à l’autre.
Devenir pauvres en esprit et riches de cœur !
Nous devons devenir pauvres en esprit et riches de cœur. Nous devons nous laisser investir de cet Esprit dont parle Isaïe et qui est l’Esprit de consécration du Messie. Cet Esprit de sagesse qui nous manque tant, cet Esprit de discernement, d’intelligence des choses, (intelligence des situations, intelligence des âmes, perception intérieure de la profondeur de mon frère qui vient à moi et qui quémande…) Nous sommes dans les tours d’ivoire de nos égoïsmes. Nous ne voyons pas, nous ne percevons pas parce que nous n’avons pas cet Esprit de discernement. Nous manquons également de cet Esprit de conseil et nous sommes donc inutiles. Aussi, laissons-nous investir par cet Esprit qui fera de nous d’autres Christs, témoins vivants et fidèles de l’Amour incommensurable de Dieu pour chacun !
Et soyons riches de cœur pour juger, non pas selon les apparences, suivant le montant du salaire mensuel, suivant le grade des épaulettes, suivant la responsabilité dans la nation… Faisons justice aux pauvres, aux petits, à l’orphelin, au misérable (qui n’est pas seulement le misérable social mais aussi le misérable spirituel l’homme dans son péché, dans la faiblesse spirituelle qu’il partage avec nous).
Soyons à l’exemple du Messie ! Suivons le Christ de notre baptême, de nos Eucharisties et qui nous dit : « L‘Esprit m’a consacré… » Pourquoi communierions-nous si ce n’était pas pour être configurés à Jésus, Fils parfaitement détourné de Lui car totalement tourné vers le Père, grâce à l’Esprit justement : « Le Verbe était auprès de Dieu et le Verbe était Dieu. »
Comme Marie, pure capacité de Dieu, qui était, dira Bernanos, si limpide et si pure qu’elle ne pouvait pas voir en elle le reflet de son image, mais qu’elle y voyait le Visage du Père.
Voilà le message de ce 2ème dimanche d’Avent : la conversion. Portons le regard non pas sur nous, mais sur Lui et sur ceux qui Le représentent autour de nous : nos frères.
Mgr Jean-Marie Le Gall
Aumônier catholique
Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.
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