Lectio divina
Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposées par l’Église pour la Messe du jour.
Lectio divina pour la Messe de la Nuit de Noël
JE PEUX TOUT EN CELUI QUI ME FORTIFIE…
« Voici que la Vierge concevra et enfantera un fils, et elle lui donnera le nom d’Emmanuel ». Je proposerais une modeste réflexion sur la signification de ce nom que nous connaissons pour l’utiliser dans nos familles, que nous aimons, mais dont quelquefois nous ignorons un peu la profondeur. Emmanuel, c’est Dieu avec nous, et Noël est vraiment le moment de consacrer quelques minutes à contempler la grandeur de ce nom.
Emmanuel, un nom que Dieu s’est donné pour que l’homme se donne à Lui
Un nom que Dieu s’est donné : ce n’est pas un nom que nous Lui avons donné. C’est lui-même qui s’est appelé ainsi vis-à-vis de nous. Notre Dieu n’est pas un Dieu caché, un Dieu qui nous fuit pour mieux nous commander, c’est un Dieu qui se montre, qui se fait visible, qui se fait nôtre. Nous rendons-nous compte de ce que signifie pour un homme que de dire : -mon Dieu, c’est Dieu-avec-nous, c’est l’Emmanuel, c’est celui qui a partagé ma vie, qui a partagé mes soucis et peines, le poids du jour… ?!
Et c’est encore plus beau lorsque nous réfléchissons sur le pourquoi de ce nom : pourquoi Dieu s’est-Il appelé et s’est-Il fait Dieu-avec-nous, avec Son peuple, le peuple qui est : « peuple-avec-moi » dira le prophète Ezéchiel ? Le pourquoi de Dieu-avec-nous, le pourquoi de l’Emmanuel c’est pour que l’homme soit avec Dieu.
Nous avons la clé du mystère de l’Incarnation, si tant est qu’on puisse avoir la clé d’un mystère, que, si Dieu s’est fait homme et si Dieu s’incarne encore aujourd’hui dans la grâce de nos âmes, c’est pour nous sauver. La preuve n’en est-elle pas dans l’Annonciation à Marie : « Et tu lui donneras le nom de Jésus… », prénom que nous devrions prononcer avec tant de tendresse.
Jésus : ‘Dieu-sauve’, un prénom qui contient toute la puissance d’Amour de Dieu, et qui nous fait deviner implicitement toute la misère de l’homme, un prénom qui devrait sonner doux à nos oreilles. Jésus… Ne pourrions-nous pas, en cette fête de Noël, réapprendre à prononcer ces simples mots, Marie, Jésus ?
Dieu-avec-nous, c’est le premier et véritable acte de l’enfance du monde
Non seulement Dieu est Dieu-avec-nous, non seulement Il est pour que ‘nous soyons-avec-Lui’, l’Emmanuel, Jésus, mais Il vient en enfant.
Dieu-avec-nous, c’est Dieu-enfant-avec-nous. Et Dieu, s’Il vient en enfant, s’Il vient tout petit, c’est parce qu’Il vient avec l’esprit de l’enfant ; ce n’est pas pour les langes, c’est pour l’intérieur, la profondeur, pour tout ce que cela signifie pour un homme que d’être un enfant.
Qu’est-ce que c’est que l’esprit d’enfance ? L’enfance c’est la petitesse, c’est l’humilité qui provoque l’admiration, l’étonnement, l’émerveillement devant celui qui est plus grand, le père, la mère, l’éducateur. Et cet émerveillement entraîne spontanément la confiance et l’amour. Voilà ce qu’est l’esprit d’enfance. Dieu dans ce mystère où Il se fait homme accomplit en fait le premier et véritable acte de l’enfance du monde, cette enfance éternelle, dont parlera Claudel.
Ne voyons-nous pas que c’est un Dieu-enfant ce Dieu qui est don entier, qui est oubli de soi, qui est toute humilité pour regarder l’homme si bas ? Ne voyons-nous pas que c’est un Dieu-enfant ce Dieu qui est toute humilité et tout émerveillement devant la grâce de Marie : « Réjouis-toi Marie pleine de grâce, le Seigneur est avec toi » ?
Réfléchissons à cet émerveillement de Dieu devant la jeune Marie, devant ses 15 ans de pureté, de pure capacité du Père… Et voilà qu’après l’émerveillement qui est là, Dieu, toujours comme un enfant, va se confier : le Père va confier Son Fils à Marie ! Alors que nous, les humains, faisons bien attention à ne pas confier nos enfants à des inconnus, voilà que Dieu tout confiant, tout émerveillé de la grâce de Marie, va lui confier Son Fils, pour qu’elle Lui donne la vie et L’éduque, y compris dans la vie surnaturelle. Et plus encore que Son Fils, le Père va confier à Marie tous Ses fils et leur salut. Saint Bernard dira : « Marie, je t’en supplie, dis-oui ; à tes lèvres est suspendue toute la re-création, toute la grâce, toute notre rédemption ! »
« Dieu vit que cela était bon »
Si Dieu est venu en enfant, c’est pour nous apprendre, pour nous réapprendre, pour nous faire redevenir des enfants, pour nous faire redécouvrir ces qualités de petitesse, de l’émerveillement, de l’admiration, de la confiance.
Regardons comme nous sommes blasés, quels que soient nos âges, du plus petit avec ses jouets qui remplissent sa chambre, jusqu’au plus savant qui se demande jusqu’où et comment il va pouvoir ‘transhumaniser’ la vie…
N’est-ce pas maintenant, en la nuit de Noël, le moment de crier pour la sauvegarde de la vie ? Sommes-nous encore capables de nous émerveiller devant une vie humaine, devant une semence qui grandit, plutôt que de vouloir l’étouffer parce qu’elle nous gêne ?
Voilà ce que Dieu cherche à provoquer en nous, en venant en nous, comme un enfant : nous faire découvrir l’émerveillement devant les merveilles du monde, donc, devant les merveilles de Dieu, et devant la merveille des merveilles de Dieu qu’est l’homme.
« Il vit que cela était bon » : pourquoi ne serai-je pas en admiration devant ce que Dieu a admiré quand Il créa l’homme à Son image, quand Il y mit Son sceau avec le Verbe et quand Il y mit Son Souffle avec Son Esprit comme cela apparaît en perfection dans l’âme de la Vierge Marie ?
Dieu est, en moi, plus moi que je ne suis moi-même…
Pourquoi, bien que pécheurs, ne serions-nous pas capables nous aussi de redécouvrir dans notre âme cette présence de Dieu-Créateur, voire de Dieu dans Sa paternité ? Dieu est en moi plus moi que je ne suis moi-même aimait à dire St. Augustin… ! Oui, Noël est la Fête de l’Emmanuel, parce qu’Il vient, mais surtout parce qu’Il est déjà là. C’est ce que Jésus veut nous montrer du doigt avec ses petites menottes dans Son humble berceau, à la crèche…
Soyons enfants pour être pleins d’émerveillement comme Dieu quand Il regarde Marie et apprenons de Lui. Comme Lui, regardons l’homme comme une capacité de Dieu… Oui, découvrons en chacun d’entre nous la présence divine du Créateur et répondons-y avec une foi confiante pour qu’elle se transforme en présence du Père.
« Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu ? »
Comment voudrions-nous attaquer l’année nouvelle qui va commencer dans une semaine ? Dans la crainte de l’avenir ou dans le réconfort de Sa Présence inamissible, si nous savons que nous sommes le temple de Dieu et qu’en Lui, nous pouvons tout ? Il n’y a pas de crainte à avoir, lorsqu’on pense que Dieu, comme s’Il était trop à l’étroit dans son infinité, S’est construit des habitations de surcroît en chacun et chacune d’entre nous pour S’y glisser, pour y être bien, y pouvant être comme chez Lui …
Voilà ce que Jésus veut nous faire découvrir. Alors, émerveillons-nous, ne serait-ce qu’une minute, devant ce qui est dans notre âme : Dieu le Père que le Fils vient de me révéler.